Sur la chaîne de télévision locale RTP, le programme "Zoom" propose des vues de Messine: carrefours, abribus, ordures, structures en béton, pylônes penchés, obturations, etc. Sans commentaire. Avec un accompagnement musical, plutôt morose.
En fait, il s'agit d'un état des lieux, d'un éventail des déprédations et des absurdités du mobilier urbain. Graffiti. Déchets. Flaques rances, taches d'humidité. Mais aussi passage pour piétons qui ne débouche sur rien. La caméra fixe le sol et se relève lentement jusqu'à découvrir, de l'autre côté de la rue, non pas un trottoir, mais une barrière en tôle ondulée.
Feu vert: droit contre un mur.
Corbeille sur le trottoir. Chaussée défoncée. Passage souterrain bouché par des cuisinières, des cadilles, des paquets de journaux, et une garde-robe virtuelle, dont on devine les replis par tous les interstices.
Quand le clip se termine, un numéro de téléphone où signaler d'autres trésors.
Messine, en somme, mais pas depuis le Détroit (étagements de façades qui miroitent sous le soleil droit devant soi, et les monts, quand on est sur le bateau): la ville par le canal, l'écoulement empêché, les vitrages opaques.
Il fait assez chaud. J'ai le droit d'abuser des granite. Je n'en donnerai pas la recette. C'est la même depuis trois générations. Au café ou au citron. Granita caffè con panna. Avec de la crème et une brioche. Des fois, je saute un repas pour elle.
Les citadins prétendent que celle de Messine est imbattable. Je ne suis pas d'accord. J'ai mes raisons. J'ai parfois la mauvaise idée de les exposer en long et en large à des amis. Ils sont venus jusqu'en Sicile. Ils viennent de se lever. La granita est posée devant eux. Ils ne demandent pas mieux que de l'ingurgiter. Mais je parle. Je parle, je détaille avec emphase les raisons, le pourquoi ils sont sur le point de vivre une expérience hors du commun.
Finalement, ils se lancent... Que dire? Tout tombe un peu à plat après ma rhétorique. Je suis déçu. J'aurais voulu qu'ils tombassent, que leurs chaises se renversassent, qu'ils criassent au miracle. Il vaut mieux se taire et laisser agir. J'y penserai la prochaine fois.
Signes non pour être complet, non pour conjuguer / mais pour être fidèle à son ‘transitoire’ / Signes pour retrouver le don des langues / la sienne au moins, que, sinon soi, qui la parlera ? H.M.
07 juin 2007
Zoom
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
1 commentaire:
Je garde en bouche le souvenir très doux, et piquant, de la granita alle mandorle. À Noto, la baroque. Probablement sous un amandier. Mais c'est bien ma bouche qui se souvient le mieux de Noto.
Enregistrer un commentaire