Signes non pour être complet, non pour conjuguer / mais pour être fidèle à son ‘transitoire’ / Signes pour retrouver le don des langues / la sienne au moins, que, sinon soi, qui la parlera ? H.M.

17 septembre 2007

Pétards la joie

«Bisogna proprio dire, osservai, parlando con Alessandro, che le vostre feste sono essenzialmente… rumore!
– Voscenza sappia, mi rispose, che la gioia si esprime coi suoni. I rumori di oggi sono niente paragonati a quelli che rallegravano le feste di quand’ero bambino. In piazza e nelle principali vie del paese si stendevano file di mortaretti grandi e piccoli, collegati da una miccia; appena si dava fuoco a questa, i botti si susseguivano con grande rapidità, e l’intero paese era scosso dal fragore, anche per un’ora di seguito. San Giuseppe, aggiunse, è di legno e non è proprio sicuro che possa udire i nostri urli e la banda e il panegirico del prete, ma i mortaretti… quelli, è sicurissimo che li sente.»
Louise Hamilton Caico, Sicilian ways and days, 1910
(trad. Renata Pucci Zanca)

Que l’Italie ait remporté le Mondial, j’en tressaille encore (j’en avais remporté un autre, à ma manière, deux jours auparavant). Ma joie n’a éclaté qu’avec un temps de retard, parce que je croyais que le penalty de Fabio Grosso n’était pas décisif, qu’un Français devait encore tirer après.
L’explosion m’a corrigé.
Nous sommes montés à Saint-François. Il y avait des pétards. On était là. Pétards. On chantait. Pétards. On sautait. Pétards. Pléthore de pétards. Finalement, les pétards, ça nous a ennuyés. Des pétards, d’accord. Que des pétards, non. Alors, nous sommes partis.

Je sais qu’en Italie, la pyrotechnie grève le budget du moindre patelin. Fête du Saint Patron: boucan d’enfer. Au point que, lors de mon premier Premier Août, j’ai cru que les feux, c’était une blague. Comment? Déjà fini? Vous avez entendu quelque chose?
Le soir de la finale du Mondial, j’aurais bien aimé que ça ressemble au Premier Août : pas trop long, pas trop fort. Ils m’ont gâché Saint-François, ces p’tits cons.
Evidemment, dire cela me classe illico dans les vieux. Vous savez, ceux qui disent: 1982, c’était mieux. Pas de tirs au but. Pas de coup de boule. Et pas – ou moins – de pétards.

Comment sauver 2006? Eh bien, en faisant remarquer que les pétards, la pléthore de pétards, ne sont pas une vogue passagère, mais une discipline consacrée. Plus on remonte le temps, plus les villages pétaradent. En Sicile, une mèche interminable était tendue dans les ruelles, une guirlande de pétards. L’explosion était ininterrompue. Ça pouvait durer une heure. On cassait la vaisselle. Les vitres volaient en éclats. La joie s’exprime avec les sons, disait Alessandro à Mme Hamilton.
À Saint-François, cette nuit-là, les pétards, c’était peut-être la résurgence de cette joie. Même le saint l’a entendue, peut-être.

Je me dis ça maintenant. Ça ne me rajeunit pas pour autant.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Mon ange,

Tu parles de la victoire de l'Italie et de la fête à Saint-François, ça me rappelle cette belle soirée ensemble.

Tu parles de pyrotechnie, ça me fait penser aux morts annoncés au téléjournal "raien" après chaque nouvel-an.

Mais ça me fait aussi penser à Valence. Là-bas, on fête "Las Fallas" en mars. C'est une fête païenne où de grands bûchers sont dressés dans la ville. Ils ont de délicieux airs de révolte populaire car les politiques et les autorités les plus sérieuses y sont tournées en dérision: des marionnettes de feutrines rivalisent avec des masques en papier mâché. Puis, les citoyens boutent le feu à tous ces magnifiques bûchers et la ville s'embrase. Elle se met à chanter à tue-tête aussi, les pétards retentissent absolutment partout.

Je n'ai jamais été à Valence en mars.

Tu parles de la manière de faire bombance en Italie où, paraît-il, la joie s'exprime par le bruit, ça me fait penser à ma maison gamine.

La musique, le bruit, c'était les voix. La voix de mon père d'abord, celle des débats politiques animés avec ses amis ensuite. Puis, il y a eu de longs silences.

Je pense aussi à ma maison aujourd'hui. Notre maison. Et je veux te dire qu'il ne faut pas que nous oubliions la musique.

Grâce à toi, nous avons la musique des mots et, ça, c'est irremplaçable.

S.